Berlinale 2019 | Critique : The Day After I’m Gone

Yoram vit seul avec sa fille. Un jour celle-ci disparait sans laisser de trace. Yoram ne réagit pas immédiatement.

The Day After I’m Gone
Israël, 2019
De Nimrod Eldar

Durée : 1h35

Sortie : –

Note : 

MANÈGE DÉSENCHANTÉ

« A quoi ça sert de demander gentiment? » s’interroge-t-on au début du film. Yoram, vétérinaire veuf d’une cinquantaine d’années, n’est pas uniquement du  genre à peu exprimer ses sentiments: il est carrément du genre à ne s’exprimer que par proverbe et aphorisme, les lèvres toujours pincées dans un rictus blasé. Un moyen de parler pour ne rien dire, sans s’impliquer, et de conserver l’illusion de tout pouvoir maitriser et expliquer. Yoram habite également près d’une fête foraine, et la présence en arrière-plan de ces carrousels annonce un manège doux-amer, prêt à secouer et tourner dans vide.

Dans les premiers plans du film, Yoram s’occupe d’un léopard endormi. La bête est potentiellement féroce, mais il s’en occupe sans sourciller. Quelque chose cloche pourtant, et ses collègues s’en rendent bien compte. Yoram fait comme si de rien n’était. Or ce petit problème qu’il pense pouvoir balayer sous le tapis, c’est tout de même la disparition de sa fille adolescente depuis plusieurs jours. Passée cette première surprise de voir ce père refuser de réagir, une deuxième arrive rapidement : le retour de sa fille, là encore sans qu’elle prenne la peine de s’expliquer non plus. Troisième surprise dans la foulée : la gamine se révèle être une peste odieuse et mal élevée, dont on imagine sans mal le père ravi d’être débarrassé…

The Day After I am Gone est le tout premier film de son réalisateur, Nimrod Eldar, et on y retrouve ce drôle de ton grinçant propre à certaines comédies israéliennes. Cette curieuse histoire de soulagement coupable rappelle d’ailleurs par moments Inertia, une autre découverte récente de la Berlinale (Forum 2016), mais le film bifurque progressivement vers un ton moins acide. Le long métrage débute dans un appartement confiné où les fauves qui tournent en rond pourraient bien se réveiller, mais c’est dans un lieu extérieur pas moins symbolique (une communauté sécurisée à outrance, mais susceptible de s’effondrer sur elle même à tout moment) que père et fille trouveront la voie de la réconciliation. Ce que le film perd alors en mordant en cours de route, il le gagne alors en bienveillance. Le manège a pu faire peur, mais chacun retombe finalement ses ses pattes.

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par Gregory Coutaut

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