Critique : She Said

Deux journalistes du New York Times, Megan Twohey et Jodi Kantor, ont de concert mis en lumière un des scandales les plus importants de leur génération. À l’origine du mouvement #Metoo leur investigation a brisé des décennies de silence autour du problème des agressions sexuelles dans le milieu du cinéma hollywoodien, changeant à jamais la société américaine et le monde de la culture.

She Said
Etats-Unis, 2022
De Maria Schrader

Durée : 2h09

Sortie : 23/11/2022

Note :

NOTRE HISTOIRE

S’il y a un point de départ factuel à trouver au séisme international du mouvement #MeToo, il s’agit sans nul doute de l’enquête sur Harvey Weinstein publiée en 2017 dans le New York Times par les journalistes Jodi Kantor et Megan Twohey. Si les conséquences de cette mise en lumière ont été publiques et connues, c’est à une dimension volontairement moins spectaculaire que s’attaque She Said : celui du courageux travail d’investigation mené par ces deux femmes tenaces.

Le scénario est signé par la Britannique Rebecca Lenkiewicz, experte en récits de rébellion tendus, (elle a cosigné Ida de Pawel Pawlikowski, Désobéissance de Sebastián Lelio et Les Séminaristes d’Ivan Ostrochovský), mais celui-ci s’inspire bien sûr directement de l’enquête de Kantor et Twohey, à tel point que ces dernières sont également créditées en tant que co-autrices. Un investissement si direct de celles qui travaillent encore aujourd’hui pour le New York Times, ainsi le fait que le film soit d’ailleurs tourné dans leurs véritables bureaux à New York, laisse à penser que la marge de liberté artistique et de distance créative a du être mince pour Lenkiewicz comme pour la réalisatrice, l’Allemande Maria Schrader (dont le précédent film, I’m Your Man, est sorti en France il y a à peine quelques mois).

Cette manière de coller aux faits de si près prive peut-être She Said d’une personnalité un peu plus unique et flagrante mais s’il coche sans surprise toutes les cases familières du film d’enquête, le long métrage sait se faire efficace et rythmé. Surtout, cela est contrebalancé par un effet de réel plus saisissant qu’ailleurs. Les faits évoqués ici sont si récents que leur pouvoir d’indignation ne s’est pas émoussé, et certaines protagonistes (telle Ashley Judd) viennent ici interpréter leur propre rôle au milieu des actrices du film, toutes autant investies (outre les performances centrales de Carey Mulligan et Zoe Kazan, Samantha Morton tire son épingle du jeu avec charisme). Cette manière qu’a la réalité de venir resurgir ainsi à divers moments du long métrage provoque un sursaut digne d’un effet 4D. Voilà le principal relief de She Said : le vertige de voir l’Histoire la plus récente s’écrire en direct sous nos yeux.

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par Gregory Coutaut

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