Critique : The Innocents

Un été, quatre enfants se découvrent d’étonnants pouvoirs et jouent à tester leurs limites, loin du regard des adultes. Mais ce qui semblait être un jeu d’enfants, prend peu à peu une tournure inquiétante…

The Innocents
Norvège, 2021
De Eskil Vogt

Durée : 1h57

Sortie : 09/02/2022

Note :

SOUS LEURS AIRS INNOCENTS CE SONT DE VRAIS BRIGANDS

Dans la première scène de The Innocents, la jeune héroïne se réveille soudain, l’air inquiet, comme si elle était encore à moitié dans le rêve qu’elle venait de quitter. Elle se trouve dans une voiture en marche, direction un nouveau quartier, de nouveaux voisins, de nouveaux enfants de son âge à rencontrer. C’est peut-être justement cela qui l’angoisse, et qui pourrait l’en blâmer? Fidèle scénariste de son compatriote Joachim Trier (également présent à Cannes cette année), le Norvégien Eskil Vogt avait déjà réalisé à son compte le singulier Blind : un rêve éveillé, où la mise en scène sensorielle visait à traduire la cécité de la protagoniste. C’est une autre perte de repères que raconte The Innocents, mais le traitement est différent.

Eskil Vogt dit avoir voulu prendre un contrepied de film d’horreur, situant son film sur des terrains de jeux d’enfants baignés de la lumière sans fin des journées d’été scandinaves. L’idée n’est pas mauvaise, la preuve étant paradoxalement que Vogt n’est pas le premier à y penser. Avec ses travelling silencieux sur des endroits déserts et symétriques, avec ce bourdonnement venu d’on ne sait où (un gimmick efficace devenu au fil des années – et des cinéastes qui l’utilisent ad nauseam – un cliché cache-misère), The Innocents ne fait au final que remplacer des archétypes par d’autres.

C’est davantage du coté de l’écriture qu’il faut chercher la singularité. Pas tant dans l’ambiguïté des figures enfantines, mais dans la cruauté inattendue et assumée de certaines scènes. The Innocents danse sur plusieurs pieds à la fois, sans qu’on soit entièrement certain de la part de maitrise de cette étrange chorégraphie, mais c’est en filmant cette violence-là, avec un malaise et une provocation presque plus autrichienne que nordique (audacieux pari, de risquer de n’avoir aucun personnage attachant – des enfants qui plus est) qu’il touche le but de tout bon film d’horreur : non pas le simple choc, mais la subversion.

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par Gregory Coutaut

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