Entretien avec Hlynur Palmason

Artiste plasticien, l’Islandais Hlynur Pálmason signe son premier long métrage avec Winter Brothers. Ce film gonflé, avec une forte personnalité et visuellement ambitieux raconte le quotidien étrange de deux frères qui travaillent dans un no man’s land du Danemark. Il s’agit d’une des très belles découvertes du Festival de Locarno et le film sort ce mercredi 21 février en salles. Nous avons rencontré son (très prometteur) réalisateur…

  

Pourquoi avez-vous choisi cette histoire en particulier pour votre premier film ?

Winter Brothers s’est imposé pour mes débuts par son aspect naïf, sa fragilité et son expressivité. C’était un projet rempli de sentiments paradoxaux, de désirs instinctifs ; ça semblait tout à fait correspondre à mon tempérament à ce moment précis. Chaque projet a quelque chose d’ « intérieur », dont on doit ensuite s’occuper, qui doit s’épanouir. Dans ce film, c’était le manque d’amour ou la volonté et le besoin d’être désiré ou aimé. Cela offrait plein de possibilités, d’ambigüités – c’est passionnant à expérimenter en termes de cinéma.

Winter Brothers est très impressionnant visuellement. Comment avez-vous collaboré avec votre directrice de la photographie, Maria von Hausswolff ?

On collabore très étroitement avec Maria, nous avons déjà travaillé ensemble sur trois autres projets et on développe le prochain ensemble. Je pense que Winter Brothers est dans la continuité de ce que nous avons entamé tous les deux. Le cinéma, pour moi, c’est voir et écouter. Quand je me plonge dans le processus créatif, petit à petit, je vois les images, je perçois les sons. J’écris et développe mes scénarios sur place, tout est écrit avec un lieu de tournage particulier en tête. On a laissé la porte ouverte à ce qui devait arriver tout en creusant le sujet, le script, les personnages, le décor etc. La clef étant que l’émotion et la vision se rencontrent. Le dialogue est une image, l’émotion est une narration.

Winter Brothers est effectivement ce genre de film dont l’histoire n’est pas seulement racontée par le scénario, mais aussi par la mise en scène, les choix esthétiques. Est-ce une approche du cinéma qui vous intéresse plus particulièrement en tant que réalisateur, ou spectateur ?

Le cinéma à mes yeux fonctionne à la fois de manière mentale et physique. C’est une aventure. J’essaie d’être aussi honnête que possible en suivant le film là où il doit aller et en tentant de capturer son essence. Ce qui nous guide dans la vie comme dans ce qu’on fait, c’est le désir d’explorer l’inconnu. Mais il n’y a pas deux réalisateurs exactement identiques, par conséquent si on est parfaitement sincère vis-à-vis de son travail, c’est là qu’on peut créer quelque chose d’unique. C’est l’individualité d’un artiste, son tempérament et sa personnalité qui donnent de la vie et des couleurs au cinéma.

Le son joue un rôle essentiel dans l’atmosphère de votre film. Pouvez-vous nous en dire plus sur la façon dont vous souhaitiez utiliser le son et la musique dans Winter Brothers ?

Je me souviens qu’on ne voulait pas que le son corresponde scrupuleusement à l’image. C’était essentiel qu’il y ait une relation organique entre notre sound designer Lars, notre monteur Julius et notre compositeur Toke. C’était crucial de pouvoir créer un univers sonore et une musique qui accueillent le monde de Winter Brothers. Je m’intéresse beaucoup au son, c’est un élément qui était déjà très présent lors des premières étapes de l’écriture. De bien des manières, j’avais le sentiment que le son était l’intérieur du film, tandis que l’image en était l’extérieur.

Quels sont vos cinéastes favoris ? Pouvez-vous en citer quelques uns ?

Il y a tant de cinéastes, d’artistes, de compositeurs et d’écrivains qui m’inspirent – c’est difficile de n’en citer que quelques uns. Je me souviens que durant la préparation de Winter Brothers, Buster Keaton a constitué une grande inspiration. J’ai regardé Le Mécano de la Générale probablement une centaine de fois avec mes enfants, je pense que cela a eu un effet sur moi et, inconsciemment, sur le film.

Quels sont vos projets ?

Mon nouveau projet se nomme A White, White Day, dont on a tourné le prologue l’été dernier. Le tournage principal aura lieu l’été prochain. C’est un mystère tourné en Islande sur l’amour inconditionnel.

Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 10 août 2017. Un grand merci à Ewa Bojanowska, Brigitta Portier et Gary Walsh.

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