Critique : Vous ne désirez que moi

Compagnon de Marguerite Duras depuis deux ans, Yann Andréa éprouve le besoin de parler : sa relation passionnelle avec l’écrivaine ne lui laisse plus aucune liberté, il doit mettre les mots sur ce qui l’enchante et le torture. Il demande à une amie journaliste de l’interviewer pour y voir plus clair. Il va décrire, avec lucidité et sincérité, la complexité de son histoire, leur amour et les injonctions auxquelles il est soumis, celles que les femmes endurent depuis des millénaires…

Vous ne désirez que moi
France, 2021
De Claire Simon

Durée : 1h35

Sortie : 09/02/2022

Note :

PARLEZ-MOI D’AMOUR

Vous ne désirez que moi est le premier film de fiction de la réalisatrice française Claire Simon depuis Gare du Nord il y a 8 ans. La réalisatrice a depuis signé des documentaires très remarqués tels que Le Bois dont les rêves sont faits ou Le Concours. Ce nouveau long métrage, présenté en compétition à San Sebastian, reste pourtant lié directement au réel car il s’agit d’une adaptation de Je voudrais parler de Duras, ouvrage dans lequel Yann Andréa s’entretient avec la journaliste Michèle Manceaux au sujet de sa relation avec l’autrice de L’Amant ou du Ravissement de Lol V. Stein. Celle-ci, quasi-omniprésente dans le film, est pourtant toujours absente de l’écran.

Il y a une radicalité tranquille dans le traitement choisi par Simon, avec ce film constitué de différents blocs d’échanges entre seulement deux personnages. Cela pourrait être aride, mais le résultat est paradoxalement assez généreux et accessible. Le dispositif minimaliste permet aux deux interprètes (Swann Arlaud et Emmanuelle Devos) de briller. Ils apportent tous les deux des reliefs bienvenus à l’ensemble et se montrent impressionnants. Arlaud comme Devos parviennent à faire exister leurs personnages de telle sorte que cela reste autant un film sur ces derniers qu’un film sur Duras.

Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de connaître Duras ou son œuvre par cœur pour apprécier le film. Si Vous ne désirez que moi ne fait pas l’impasse, par exemple, sur le caractère quelque peu improbable de cette relation entre une femme âgée et un jeune homosexuel, Duras hors cadre apparaît presque comme un étrange personnage fictif. L’épure chez Simon n’est pas figée et la cinéaste réussit à créer une bulle immersive. Le pari narratif pourrait être écrasant mais Vous ne désirez… est un film vivant, à la fois simple et ambitieux.

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par Nicolas Bardot

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