DVD | Critique : Shadow in the Cloud

Durant la Seconde Guerre Mondiale, une pilote tente d’avertir ses opiniâtres collègues masculins qu’un inquiétant danger les guette. Un cauchemar à 20.000 pieds du sol débute…

Shadow in the Cloud
Nouvelle-Zélande, 2020
De Roseanne Liang

Durée : 1h23

Sortie : 15/04/2021

Note :

FAITE POUR L’AZUR ET SES CONQUÊTES

Le ciel n’a pas de limites et Shadow in the Cloud n’en n’a pas beaucoup plus. Maude Garrett (Chloë Grace Moretz) est pourtant enfermée dans un espace particulièrement exigu et claustrophobe : dans un minuscule cockpit situé sous la carlingue d’un avion de chasse. Seule, face à des parois transparentes entre lesquelles elle n’a même pas la place de bouger, elle ne peut que faire face au terrifiant ciel nocturne en face d’elle. Sa cage est d’autant plus anxiogène qu’elle est reliée par radio au reste de l’équipage composé de machos rigolards qui prennent plaisir à la rabaisser. Le huis-clos est méticuleusement tendu, à en griffer les accoudoirs, et rappelle le brillant Exit (Cutterhead), qui utilisait déjà l’oppression physique comme métaphore de la domination masculine. Il est d’ailleurs question d’autres métaphores dans Shadow in the Cloud mais comme dans un trou d’air inattendu, le film décide d’envoyer valdinguer ses allégories.

Sans trop en dévoiler, la réalisatrice néo-zélandaise Roseanne Liang a quelques loopings dans sa poche. Il y a un aplomb admirable dans sa stratégie : plutôt que de continuer à éprouver le spectateur, elle choisit de lui faire écarquiller les yeux de plus en plus grand. Faire un film qui change de goût et varie de registres jusque dans son générique de fin, voilà une sacrée prise de risque. Liang n’a pas composé un cocktail chic, mais un punch qui tourne la tête vite et fort, dans la plus excitante des ivresses. La rigueur se prend quelque coups au passage mais le film garde un auguste panache. Même lorsqu’il titube, Shadow in the Cloud est d’une générosité jubilatoire qui semble ne jamais vouloir s’arrêter.

Derrière ces figures acrobatiques, il y a un culot plus fort que les autres : celui de lâcher par moments la main à l’esprit de sérieux, pourtant acquis avec honneur et grâce à de vraies idées de mise en scène (a-t-on bien vu un hommage à Kenneth Anger au détour d’une brève séquence?). Lâcher la main au sérieux – comme quand on lève très haut les bras dans un grand huit – mais pas définitivement. Roseanne Liang sait très bien ce qu’elle fait en plaçant en introduction du film un cartoon à la fois absurde et éducatif. Encore une fois sans trop en dire, Shadow in the Cloud parle de quelque chose de très sérieux, d’une réalité passée et présente. Mais il le fait avec le plus inattendu des langages malpolis. Il parle avec des figures de style et des figures aériennes, avec un sourire goguenard mais conquérant. Y a-t-il un pilote dans cet avion? Oh oui.

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par Gregory Coutaut

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