Critique : Red Rocket

Mikey Saber revient dans sa ville natale du Texas après des années de carrière de pornstar à Los Angeles. Il n’y est pas vraiment le bienvenu… Sans argent, sans emploi, il doit retourner vivre chez son ex-femme et sa belle-mère… Pour payer son loyer, il reprend ses petites combines mais une rencontre va lui donner l’espoir d’un nouveau départ.

Red Rocket
Etats-Unis, 2021
De Sean Baker

Durée : 2h08

Sortie : 02/02/2022

Note :

FUSÉE POUR NULLE PART

Les films de Sean Baker ne sont jamais tournés aux mêmes endroits (les rues de Los Angeles dans Tangerine, les motels d’Orlando dans The Florida Project, ici un coin complétement paumé du Golf du Texas où les usines et les marécages servent d’unique horizon), et pourtant on s’y retrouve en terrain familier. La formule de Red Rocket est similaire à celle des autres films du cinéaste : d’une part donner à voir les États-Unis à travers ses marges invisibilisées, et de l’autre redonner dignité à celles et ceux qui les habitent en collant aux basques (souvent du premier au dernier plan) à un personnage irrésistible bien qu’ingérable.

Quand Mikey revient dans ce quartier où il a grandi, on l’accueille avec des « mais qu’est-ce que tu fous là » avant même de lui dire bonjour. Pour une fois, Sean Baker ne s’attache pas tout à fait à un protagoniste déshérité mais à quelqu’un qui, l’espace d’un instant, a possédé tout ce qu’il a souhaité, et qui en a conservé une fierté de fanfaron. Le film y gagne une certaine aspérité. Mikey n’a certes pas grand chose en poche : pas de travail, pas d’argent et même pas de valise. Ce qu’il a, c’est cinq récompenses à son actif en tant qu’acteur porno, et il ne manque pas l’occasion de s’en vanter à qui veut l’entendre, c’est à dire pas grand monde.

Les précédents films de Baker tiraient leur énergie contagieuse de leurs protagonistes branchés sur 200 volts, une énergie qui tchatchait et carburait sans faiblir. Mikey a certes du blabla et de la poudre aux yeux à revendre, mais malgré son humour et son titre qui fuse, l’atmosphère de Red Rocket est un plus mélancolique que prévu. Il y a une amertume notable (mais pour tout dire un peu convenue) à entendre les discours patriotiques de Trump dans ce coin perdu où l’on survit grâce à l’entraide, la drogue et la prostitution. Cette histoire d’escroc à la petite semaine, inadapté même aux pays des rêves déchus, n’est peut-être pas le beignet sucré attendu mais sa bienveillance douce-amère fait mouche de façon attachante.

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par Gregory Coutaut

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