Critique : Petite soeur

Brillante autrice de théâtre, Lisa n’écrit plus. Elle vit en Suisse avec sa famille, mais son cœur est resté à Berlin, il bat au rythme de celui de son frère Sven, célèbre acteur de théâtre. Les liens des jumeaux se sont resserrés depuis que Sven est atteint d’une leucémie agressive. Lisa refuse cette fatalité et remue ciel et terre afin qu’il remonte sur scène. Pour son âme sœur, elle se donne entièrement, néglige tout le reste, au risque de mettre son couple en danger…

Petite sœur
Suisse, 2020
De Stéphanie Chuat & Véronique Reymond

Durée : 1h39

Sortie : 06/10/2021

Note :

PETITE SŒUR, JE CONNAIS TA PEINE ET TA DOULEUR

Sélectionnées en compétition à la Berlinale, les Suissesses Stéphanie Chuat et Véronique Reymond se sont distinguées avec leur premier long métrage La Petite chambre, sorti en France il y a quelques années. Au duo de leur précédent film (Florence Loiret-Caille qui prenait soin de Michel Bouquet) succède un autre duo, cette fois d’une même génération. Les excellents Nina Hoss et Lars Eidinger jouent même des jumeaux dans Petite sœur, mélodrame qui examine le lien d’une sœur et d’un frère alors que ce dernier est frappé par la maladie.

Petite sœur débute par une scène où l’héroïne, Lisa, effectue une prise de sang. Ce geste plutôt banal nous renseigne également sur ce qui intéresse Chuat et Reymond : sur ce qu’il peut y avoir d’indicible dans les liens du sang. Rapidement pourtant intervient une scène de comédie familiale dysfonctionnelle autour de la mère, incarnée par Marthe Keller, qui clope et picole, qui prépare le gâteau préféré de son fils et a toujours un mot revêche pour sa fille et dont l’appartement berlinois est un musée de la mémoire familiale. Les deux cinéastes installent avec aisance les dynamiques et tensions larvées dans cette famille qu’on croit connaître en quelques plans et répliques.

Le héros, Sven, est souffrant, et débarque dans le film à l’image d’un personnage de Patrice Chéreau qui atterrirait dans un paisible décor suisse (comme ici dans cette petite ville constituée d’une rue, dans un décor de carte postale qui évoque tout de suite Heidi et l’air pur). Au nerf à vif qui constitue une partie du cinéma de Chéreau, les deux réalisatrices préfèrent un naturalisme plus calme où la tension vient essentiellement de l’interprétation. Petite sœur est au service de ses acteurs : Lars Eidinger et surtout Nina Hoss font des merveilles dans des rôles qui auraient pu se heurter aux archétypes.

Ils sont tous les deux aidés par l’écriture assez subtile de Chuat et Reymond, qui emmènent leur récit de tous les jours aux portes du conte. Le scénario parvient également avec une grande fluidité à zoomer puis dézoomer sur ses différents personnages, tandis que la caméra saisit les effusions sonores mais aussi les émotions silencieuses. Le résultat, classique dans la meilleure expression du terme, est réussi et émouvant. 

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par Nicolas Bardot

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