Les Arcs Film Festival | Critique : Lynn + Lucy

Lynn et Lucy sont meilleures amies et entretiennent une relation aussi intense qu’une romance. Ni l’une ni l’autre ne s’est aventurée loin de là où elles ont grandi. Lynn, qui a épousé son premier petit ami et dont la fille grandit rapidement, est ravie quand la charismatique et volatile Lucy a son premier enfant. Pourtant, cette dernière ne réagit pas comme Lynn s’y attendait. Leur amitié est finalement mise à l’épreuve dans des circonstances extrêmes…

Lynn + Lucy
Royaume-Uni, 2019
De Fyzal Boulifa

Durée : 1h34

Sortie : –

Note :

CAR JE RESTERAI TA MEILLEURE AMIE

Primé à Cannes pour son court métrage The Curse, le Britannique Fyzal Boulifa signe son premier long  avec Lynn + Lucy. Signe d’un talent prometteur : le réalisateur parvient à faire preuve de personnalité en seulement quelques plans. On a pourtant l’impression de bien connaître le décor de ce long métrage qui semble s’inscrire dans une tradition très classique du film social anglais. Mais Lynn + Lucy n’en a finalement que les apparences : dans ce film, les mécanismes des violences de groupe rappellent un cinéma européen plus à l’est, comme on peut le trouver en Autriche ou en Suède.

Boulifa fait preuve d’un sens du détail remarquable, mis en valeur par le dépouillement général de la mise en scène. Cette épure qui pourrait être un manque de caractère est une vraie finesse qui se met au service du travail (formidable) des comédiennes, et qui met en valeur l’ambiguïté qui règne dans l’écriture des personnages. On les voit bien, fatigués, souvent en gros plans. Mais qu’est-ce qu’on voit au juste ? Lynn + Lucy raconte une situation terrible, mais la violence, comme le montre Boulifa avec subtilité, c’est aussi de simplifier à outrance des choses complexes : qu’il s’agisse de la relation entre les héroïnes (que personne ne comprend, et que donc personne ne respecte) mais aussi la notion de culpabilité.

Lynn + Lucy, dans ce portrait très singulier d’une amitié au bord du vide, parle intelligemment de certitudes et de leur vacillement, de ce qu’on croit tatoué à jamais mais qui finalement pourrait bien s’effacer. Il y a de la cruauté dans ce récit, mais aussi une honnêteté assez impressionnante par un jeune réalisateur qui ne prend pas ses spectateurs pour des enfants. Le dernier plan, génial et d’une amertume glaçante, dit tout en ne disant littéralement rien, avec un prodigieux sens de l’ellipse.

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par Nicolas Bardot

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