Critique : Lingui, les liens sacrés

Dans les faubourgs de N’djaména au Tchad, Amina vit seule avec Maria, sa fille unique de quinze ans. Son monde déjà fragile s’écroule le jour où elle découvre que sa fille est enceinte. Cette grossesse, l’adolescente n’en veut pas. Dans un pays où l’avortement est non seulement condamné par la religion, mais aussi par la loi, Amina se retrouve face à un combat qui semble perdu d’avance…

Lingui, les liens sacrés
France, 2021
De Mahamat-Saleh Haroun

Durée : 1h27

Sortie : 08/12/2021

Note :

CERCLE VERTUEUX

Le hasard du calendrier veut que la sortie de Lingui soit quasiment concomitante à cette de L’Événement, avec qui il partage plus d’un point commun scénaristique. Ici aussi l’héroïne est une jeune fille qui n’est pas « ignorante du monde » et qui, pour ne pas risquer de perdre sa chance de s’émanciper socialement, décide de subir un avortement clandestin. Passé ce point de départ, les films diffèrent suffisamment dans leur mise en scène pour que la référence au Lion d’or d’Audrey Diwan ne soit pas une éclipse trop écrasante.

Par exemple, Lingui n’est pas filmé comme un film d’action. Son ambition est autre. Dans ses précédents films, le cinéaste tchadien Mahamat-Saleh Haroun a prouvé à plusieurs reprises son talent pour tisser avec discrétion la tension (notamment dans Daratt saison sèche ou Un homme qui crie). Ce sentiment d’urgence fait ici défaut, et on s’étonne de trouver le film un peu trop lisse face à un sujet si brûlant. En place de la tension, c’est au contraire une sorte de douce chaleur qui est présente à l’écran. Celle-ci détonne face aux enjeux du scénario, jusqu’à ce que cela s’amalgame enfin dans le derniers tiers du film.

C’est en effet dans son beau dénouement que Lingui trouve son meilleur relief, lorsqu’il dépeint alors les « liens sacrés » du titre : un cercle de solidarité féminine s’épanouissant en cachette hors des cadres de la religion, de la politique et du patriarcat. Lorsque les femmes du village se mettent enfin à ensemble, dans des vêtements si colorés qu’elles ressemblent à des oiseaux de paradis, on a alors moins l’impression d’assister à une simple réunion dominicale qu’au plus chaleureux des rituels magique.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article