Critique : Memory House

Cristovam, originaire de l’arrière-pays brésilien, travaille dans une usine d’une région prospère du Brésil, ancienne colonie autrichienne. Il s’y sent seul, marqué par les différences culturelles et ethniques. Un jour, il découvre une maison abandonnée remplie d’objets lui rappelant ses origines.

Memory House
Brésil, 2020
De João Paulo Miranda Maria

Durée : 1h33

Sortie : 31/08/2022

Note :

PASSÉ COMPOSÉ

 Memory House (Casa de Antiguidades) est le premier long métrage du cinéaste brésilien João Paulo Miranda Maria, après une poignée de courts passés par Cannes, Venise ou New York. Tout frais (le film vient de faire sa première mondiale à Toronto), le film fait également écho au passé du cinéma brésilien en la personne d’Antônio Pitanga, figure du Cinema Novo dans les années 60. Celui-ci joue ici un protagoniste abattu, dont la silhouette semble porter la trace d’années de discriminations. Des années après avoir quitté son nord-est natal, Cristovam est désormais le seul Noir dans une communauté blanche hostile où chacun le traite comme un moins-que-rien, à commencer par son patron, qui le vire dès le début du film. Encore plus isolé, il doit alors trouver refuge en pleine foret bucolique, dans une cabane apparue comme magie. Loin des humains, le soi-disant sous-homme s’enfonce dans le royaume animal.

Allégorie, surnaturel… Il y a en effet beaucoup de choses qui arrivent sans explications dans Memory House, quitte à ce que ce soit parfois arbitraire. Au moment de faire naitre le trouble, João Paulo Miranda Maria emploie des moyens un peu rigides et trop convenus. Il y a ce bourdonnement sourd en nappe de fond, qui est devenu un cliché de cinéma depuis plusieurs années. Il y a ces lents travelling à travers des décors immobiles et géométriques, un mouvement répété à outrance, jusqu’à ne plus ressembler qu’à un gimmick. S’il est régulièrement frustrant à force de faire le malin, Memory House offre néanmoins de très beaux plans, grâce à la photographie de Benjamín Echazarreta (chep opérateur de Sebastián Lelio).

Si le film a du relief, c’est aussi grâce à ses nombreux niveaux de lecture. Memory House a un pied dans le folklore et l’autre dans la science-fiction, un pied dans dans l’Histoire coloniale du Brésil et l’autre dans les tensions raciales contemporaines, un pied dans le cinéma d’antan et l’autre celui d’aujourd’hui. Quelle est riche à souhait, la métaphore de cette cabane où ressurgit le passé, sans qu’on ne sache très bien s’il s’agit d’une malédiction ou d’un signe d’espoir. Elle est le symbole d’une mémoire nationale dont on ne sait pas toujours quoi faire, et qui peut rendre fou.

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par Gregory Coutaut

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