Festival de Films de Femmes de Créteil | Critique : Bipolar

Une jeune femme arrive à Lhassa, au Tibet. Endeuillée, elle ne sait pas vraiment pourquoi elle est là ni quoi faire de sa douleur…

Bipolar
Chine, 2021
De Queena Li

Durée : 1h51

Sortie : –

Note :

AU LOIN S’EN VONT LES NUAGES

L’héroïne meurtrie de Bipolar part à Lhassa, et c’est certainement pour se retrouver. C’est en tout cas le genre de carte postale à laquelle on s’attend en découvrant le premier long métrage de la Chinoise Queena Li. Pourtant, très rapidement, on s’aperçoit que la jeune femme n’entre pas vraiment dans une quête spirituelle et se demande assez vite ce qu’elle fait là. Dans Bipolar, on propose plutôt de changer de vie en enfilant une perruque dans l’improbable boutique d’à côté. Lhassa ici est inattendu, on entre dans un hôtel au luxe désuet, on se cogne aux cadavres de bouteilles abandonnées ici ou là. De quoi doit-on guérir au juste ?

L’héroïne est un peu paumée et elle a de quoi. Queena Li la dépeint en spectatrice d’un monde qui ressemble autant au Tibet qu’aux États-Unis qu’à la Quatrième dimension. Elle met en scène une nature extraordinaire, dans les deux sens du terme. Car la fantaisie se fait très vite une place dans Bipolar. Une digression nous permet de vivre la vie colorée d’un homard sacré – moment merveilleux. « Voyager, c’est comme rêver » entend-on dans le long métrage, et le chemin emprunté par l’héroïne, s’il peut mener à la découverte de soi, peut lui faire faire d’improbables détours – dans la comédie absurde, ou vers une tension fantastique. Bipolar se déleste de beaucoup de clichés en évitant la leçon de vie et en n’obligeant pas son récit à avoir du sens en permanence.

Pourtant, la raison de la venue de la jeune femme à Lhassa se dessine peu à peu en flashback. La structure picaresque se met en place et le film perd un peu de son grain de folie en route, lorsque sa mécanique s’installe. Mais voilà un premier long métrage excitant qui n’hésite pas à marier des tonalités différentes – et quelle splendeur formelle. La majestueuse utilisation du noir et blanc est remarquable dans le film, et la mise en scène chez Queena Li est émotionnelle : ce noir et blanc hébété, au bord de la vie, puis au loin scintillent pour l’héroïne les couleurs éblouissantes du monde.

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par Nicolas Bardot

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