Critique : Le Pardon

Iran, de nos jours. La vie de Mina est bouleversée lorsque son mari est condamné à mort. Elle se retrouve seule, avec leur fille à élever. Un an plus tard, elle est convoquée par les autorités qui lui apprennent qu’il était innocent. Alors que sa vie est à nouveau ébranlée, un homme mystérieux vient frapper à sa porte. Il prétend être un ami du défunt et avoir une dette envers lui.

Le Pardon
Iran, 2020
De Behtash Sanaeeha & Maryam Moghaddam

Durée : 1h45

Sortie : 27/10/2021

Note :

DU SILENCE ET DES OMBRES

Le cinéma iranien est comme chez lui à la Berlinale : avec les récents Ours d’or décernés à Une séparation de Asghar Farhadi, Taxi Téhéran de Jafar Panahi et Le Diable n’existe pas de Mohammad Rasoulof (prochainement dans les salles françaises), aucun pays n’a été autant célébré. Le Pardon, présenté en compétition cette année, nous invite en terrain plutôt familier avec ce combat de femme face aux institutions. On entre assez inévitablement en empathie avec cette héroïne qui se bat contre l’injustice, dans une société où toute les décisions des hommes, même les plus terribles, seront justifiées par Dieu.

Si l’on ressent cette compassion, ça n’est pas seulement grâce au sujet du film mais aussi grâce à l’interprétation convaincante de Maryam Moghaddam, également co-réalisatrice du long métrage avec Behtash Sanaeeha. Elle parvient à rendre vivant un personnage qui aurait rapidement pu être prisonnier du carcan de la mère-courage. Au-delà de la brutale injustice dont Mina et son défunt mari ont été victimes, Le Pardon dépeint également un système injuste et violent vis-à-vis des femmes. Ici, le dossier de logement d’une veuve – par conséquent déclassée socialement – pourra être rejeté comme celui d’un junkie ou d’un propriétaire de chien.

De ce combat contre l’injustice, le film se resserre ensuite sur les thèmes de la culpabilité, la reconstruction et le secret. C’est là que le long métrage nous semble plus empesé. Si ses symboles sont assumés, Le Pardon reste un peu trop lisible. C’est un récit de vache à sacrifier, dans lequel l’héroïne travaille dans une usine à lait. C’est un film sur la difficulté à s’exprimer et à se faire entendre, dans lequel la fille de l’héroïne est muette et lit sur le visage de sa mère. Il y a une intéressante ambiguïté tragique dans les rapports explorés par le film, mais le traitement un peu scolaire empêche à notre sens de ressentir cette complexité, cette profondeur.

Si l’on a le sentiment d’avoir souvent de l’avance sur le personnage principal, le dénouement (que l’on ne dévoilera pas) change assez la donne. Plus tôt dans le film, on conseille joyeusement à Mina de se bourrer la gueule et de regarder des soaps turcs à la télé pour décompresser. Solide, élégamment mis en scène, ce drame aurait, à nos yeux, peut-être gagné à aller davantage vers l’imprévu.

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par Nicolas Bardot

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